UNE THÉRAPIE DE L’ACTION
« Oui, soulager les souffrances, apaiser les douleurs… cet objectif est d’ailleurs le seul point que nous partageons avec les psys plus traditionnels ». Là où la comparaison s’arrête, c’est que la thérapie brève, née après-guerre à Palo Alto en Californie du Nord, s’impose d’abord comme une méthode de résolution de problème où le « client » – ici, la sémantique a son importance -, est actif et volontaire. « Nous préférons ce mot à celui de « patient », qui évoque une attitude plus passive. » De même que coaching, dans leur bouche, viendra souvent remplacer « thérapie ».
« La particularité de ce type de travail, c’est qu’il faut l’envisager comme un partenariat entre le thérapeute et la personne qui vient consulter, basé sur des expériences à réaliser par les clients entre deux séances, une sorte de boite à outils qu’il leur sera facile de réutiliser. Le système dans lequel la personne évolue se voit alors modifié et les améliorations apparaissent, généralement au bout de 3/4 séances. Par opposition à une méthode freudienne, il s’agit là, véritablement, d’une thérapie de l’action où il est primordial de s’impliquer ».
On laissera de côté ce que l’on croyait savoir sur le sujet, et notamment ces réserves liées au nom même de thérapie brève, la « brièveté » pouvant induire dans nos cerveaux formatés une idée d’imperfection ou d’inachevé, et l’on s’attardera sur les parcours diablement étonnants de ce binôme qui met tout en œuvre pour nous rendre la vie plus simple et plus légère.
SEMBLABLES ET COMPLÉMENTAIRES
Nathalie venue du monde de la communication, 20 ans passés dans de grands groupes internationaux – IBM, Compaq, HP, eBay… – puis en indépendante, avant d’être happée par cette évidence, au creux du premier confinement, « cette parenthèse magique » dit-elle : « Je ne voulais plus bosser dans la com. Le jargon, la posture… j’ai décidé que j’en avais terminé. » Une révélation aussi pour Chris qui, à quelques encablures de là, romps les amarres avec l’Éducation Nationale après plus de 20 ans CPE puis proviseure adjointe : « Pour moi, le déclencheur, ça a été Samuel Paty ». Et avant cela, un incident, ce jour où un élève tente de l’étrangler : « Il ne supportait pas l’autorité des femmes… L’humour m’avait toujours permis de désamorcer les situations complexes mais là, une ligne rouge a été franchie. »
Elles suivent ensuite, au même moment, les enseignements des deux pontes de la thérapie brève (Emmanuelle Piquet, fondatrice des centres À 180 degrés – Chagrin Scolaire pour Chris, Dany Gerbinet, fondateur de l’Institut de l’Inverse pour Nathalie), se croisent au détour d’un module de formation commun et « tombent en amitié », comprenant aussitôt qu’en plus de leur passion pour ces nouveaux apprentissages, elles ont en partage un parcours personnel hors normes, certaines blessures, des questionnements, une façon d’envisager la vie, faite d’instinct, de spontanéité et d’un brin de folie. Et ce regard enthousiaste et généreux, « non jugeant et non normatif », sur le monde et les bipèdes qui les entourent.
Surtout, elles sont habitées par les mêmes doutes : S’installer, oui mais où ? Plutôt seule ou accompagnée ? Car « dans ce métier, la solitude est pesante. » Ni une ni deux, comme pour déjouer la peur, elles décident de « sauter ensemble dans la piscine ».
SOULAGER TOUTES LES SOUFFRANCES
On vient à elles pour une douleur diffuse et soudaine ou un mal plus ancien, et pour réparer mille choses : interroger la finalité d’un parcours étudiant, d’un quotidien professionnel chaotique, sortir d’une relation dysfonctionnelle, d’un harcèlement scolaire, apaiser une vie dont les digues s’effondrent pour cause de trop plein. Mais encore pour un problème d’addiction, d’insomnie ou de deuil, une impossibilité à poursuivre un cheminement normal. « Il y a des solutions, autres que les médicaments, dont la France est à ce jour le plus gros consommateur, et c’est à chacun d’aller les chercher en lui-même. Le préambule obligatoire, c’est de vouloir changer » disent-elles avec insistance.
Complémentaires dans les profils qu’elles reçoivent – Nathalie plus axée sur les phobies adultes et les burn-out, Chris sur les désarrois de l’adolescence -, elles conjuguent leurs regards, et potentialisent leurs effets sur certains sujets, en plus de leurs superviseurs respectifs : « Nous nous passons alors les dossiers, croisons nos analyses, faisons de la co-vision et réfléchissons à deux aux outils les plus adaptés à la situation donnée. Seule, on s’essouffle vite et on tourne en rond ! »
RETROUVER SA CAPACITÉ D’AGIR
Ensemble, elles viennent alors éclairer les mécanismes secrets et mystérieux qui nous font agir à rebours de nos intérêts, les stratégies que l’on met en place pour éviter de se confronter à ce qui nous détruit à petit feu ou le contrôle que l’on essaie d’exercer sur soi et sur les autres. Avec elles, on fera un bout de chemin, quelques séances suffisant le plus souvent pour dénouer une situation, agir sur ses blocages, retrouver son autonomie et sa capacité d’agir.
Laissons le mot de la fin à celles et ceux qui, venus les consulter, leur rendent de vibrants hommages : « Notre fils, apaisé, est retourné à l’école » ; « Finesse de vue, délicatesse et bienveillance » ; « Voir comment traverser un problème plutôt que d’en chercher les causes m’a aidé à prendre du recul et avancer. » ; « Je ressors de cette expérience avec un autre regard (…) et surtout des outils qui me seront utiles tout au long de ma vie. »